Marie

Au Liban, une mère et son fils, réfugiés syriens, consultent dans une unité médicale mobile.

Au Liban, une mère et son fils, réfugiés syriens, consultent dans une unité médicale mobile.

L’Evangile de Matthieu raconte qu’après le départ des Rois Mages, un ange du Seigneur apparut à Joseph et lui dit de fuir en Egypte, pour éviter qu’Hérode ne tue l’enfant. Joseph partit alors avec Marie et Jésus (Mt 2, 13-15).

A cette époque-là, Marie avait à peu près douze ans. Pour comprendre comment elle a pu appréhender le drame de l’exil, il faut connaître son éducation, mais c’est un aspect qui n’est pas bien documenté. Nous savons, toutefois, que les Hébreux, par leur foi et leur spiritualité, sont préparés à accueillir ce défi de l’inconnu. Marie aussi se situe dans cette compréhension de la foi des Israélites : c’était une épreuve qu’il fallait vivre dans la confiance en un Dieu qui n’abandonne jamais ses enfants.

La plupart des auteurs décrivent Marie comme une mère hébraïque honnête, qui limitait ses horizons à la vie familiale et qui, donc, ne pouvait suivre que de loin le chemin de son fils.

Marie est la mère de Jésus. Dans une optique évangélique, cela signifie que Marie appartient à « l’évènement Jésus » ; sa maternité va au-delà du plan physique : celle-ci institue un rapport avec le Verbe et avec le Père. La maternité a conduit à reconnaître Marie comme la mère de Dieu et à la présenter comme la mère dans l’ordre de la grâce, dans la mesure où elle devient la mère des croyants et de l’Eglise. Cette perspective de foi déterminera la naissance d’un traité théologique, la mariologie. Ce traité donnera une certaine unité aux problématiques historiques et théologiques qui se sont créées tout au long des siècles.

Le développement d’une pensée féministe rend vigilant vis-à-vis d’une double présentation de cette femme : sa vision négative comme tentatrice et son exaltation excessive d’icône divine. Dans l’imagination populaire, Marie est une jeune femme sans âge ; privée de tout contact avec le temps, elle n’en a même pas avec l’espace ; son corps, est totalement centré sur la virginité.

Si on abandonne cette idéalisation, l’image de Marie est orientée afin qu’elle puisse exprimer toute sa signification. La tradition a concentré la figure de Marie autour de la maternité, c’est-à-dire, la capacité de Marie d’accueillir le mouvement d’amour du Père envers l’humanité. C’est dans ce sens-là que Marie est pleine de grâce. A la grâce divine correspond la foi que Luc indique comme une adhésion au Dieu pour qui rien n’est impossible.

Comme le risque de la mariologie consiste en une somme de doctrines et de privilèges, il faut montrer sa signification pour l’ensemble de l’histoire du salut. Comme Benoît XVI l’a écrit dans son encyclique, l’amour de Dieu est la racine de l’image chrétienne de Dieu, de l’image de l’homme et de son chemin. C’est dans ce contexte qu’il faut situer Marie. Dans le même sens, le cardinal Ratzinger avait développé sa conception trinitaire de Dieu autour de deux thèmes : celui de l’unité et celui du dialogue que les personnes divines instaurent. Pour Benoît XVI, il s’agit d’une véritable révolution dans la vision du monde : la suprématie absolue de la pensée focalisée sur la substance est déracinée, parce que la cette relation est découverte comme une modalité primitive du réel. C’est sur cette conception qu’il faut relire la figure de Jésus et de Marie. C’est dans la relation filiale entre Jésus et le Père que l’unité avec lui est gardée. L’amour, en effet, n’est pas un simple étonnement face à la bonté et à la beauté de ce qui existe, mais c’est aussi le fait d’avoir choisi cette personne.

Dans cet amour, Marie aime tout et tous, rien ni personne ne lui est indifférent. Or, si Jésus est le Verbe, Marie reçoit, par son fils divin, ce rôle maternel avec lequel elle accompagne la vie de son fils. Cet ensemble de relations entre Marie et les personnes divines a été reconnu par l’Eglise sous le titre « Théotokos » (du grec Θεοτόκος, « qui a enfanté Dieu »). Dans ce sens, l’Esprit appartient à la structure de l’Incarnation et Marie est conçue comme œuvre du Saint Esprit : cet œuvre de l’Esprit doit être comprise dans la mesure où l’action par laquelle le Verbe devient moyen de révélation de l’amour trinitaire pour l’humanité est le résultat de l’Esprit d’amour présent dans l’humanité de Jésus et le Verbe obéissant et sa volonté de communion.

La virginité de Marie peut être comprise sur la base de sa personne et de sa tâche. Tandis que la maternité est le résultat d’une mission qui fait adhérer Marie au Christ, la virginité est le résultat d’une communion où Marie se remet à Dieu. Cette virginité n’est pas qu’un fait biologique, mais surtout spirituel.

La troisième vérité mariale concerne le dogme de l’Immaculée Conception ; ce dogme est peut-être la précision la plus élevée des rapports entre Christ et Marie et fait en sorte que sa grandeur éclaircisse le rôle unique de Christ Sauveur. La quatrième vérité mariale est sa glorification : le sens de cette vérité consiste à souligner la splendeur de son œuvre salvifique pour l’humanité. La dernière vérité mariale est la coopération maternelle de Marie à l’œuvre salvifique du Christ. Elle accueilli sa sanctification et sa consécration mais ce n’est pas elle qui la demande. Cet aspect n’empêche pas que Marie maintienne un rôle spécial par rapport à l’humanité : pour elle, la sanctification est la synthèse de la capacité humaine de répondre à Dieu. Les difficultés de la vie renforcent le besoin de se remettre à la protection divine et Marie en est la médiatrice naturelle. La prière du rosaire et celle du « Je vous salue Marie », le pèlerinage sont des gestes spontanés d’une religiosité  populaire dans lesquels la spiritualité mariale s’entrelace avec les inquiétudes de la vie.

Dans ce contexte, Marie est conçue comme une personne toujours prête à intervenir dans l’histoire des hommes, dès que ses enfants l’invoquent.

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