Vivre l’hospitalité à la manière de Jésus

Des écoliers à Jericho, en Palestine.

Des écoliers à Jericho, en Palestine.

Lorsque Jésus envoie les Douze en mission — plutôt vers ceux qui sont loin que vers ceux qui sont proches — (Mt 10, 5-15), il leur transmet sa manière de faire, il les invite à entrer dans l’attitude de fond qui est la sienne. D’abord, la simplicité qui caractérise son itinérance, et surtout la pratique de l’hospitalité.

L’hospitalité commence sur le seuil, comme pour Abraham (Gn 18). Ou plutôt, c’est sur le seuil qu’elle se décide. Lorsque, la porte à peine entr’ouverte, un regard va considérer celui ou celle qui se présente, un inconnu, l’étranger facilement perçu comme tel. Un regard qui va décider s’il s’agit d’un hôte ou d’un ennemi, et de la large ouverture de la porte, ou de sa fermeture brutale. L’accueil offert commence par les salutations, par où l’on se reconnaît à hauteur d’homme, et s’épanouit dans la bénédiction : la paix et la joie d’une mutuelle reconnaissance.

L’hospitalité se joue sur le seuil de la maison, ou sur la place de la ville. Là où attendent les immigrés en quête de travail, à qui une attitude hospitalière va proposer un emploi dans la vigne (Mt 20,1-16) ; ou là où se morfondent les pauvres, qu’un geste d’accueil va inviter au repas de fête (Lc 14,15-24).

L’hospitalité à la manière de Jésus se montre aussi dans son consentement à se laisser arrêter par quelqu’un lorsqu’il est en chemin. Jésus a toujours le temps pour rencontrer quelqu’un, pour accueillir sa détresse ou sa souffrance, prendre part à sa joie, changer de route pour aller soulager un malade.

Et puis, l’hospitalité de Jésus se révèle dans les conversations qu’il engage avec des gens de toute sorte. Avec la Samaritaine (Jn 4,1-26), la Syro-phénicienne (Mc 7,24-30), avec les Pharisiens (Lc 7,36ss), avec le centurion (Lc 7,1-10). La conversation est essentielle à l’hospitalité, puisqu’en s’y engageant, nous acceptons de parler avec un autre, voire avec quelqu’un de radicalement autre, sur un pied d’égalité et selon une attitude de réciprocité.

Jésus, le Fils de l’Homme qui n’a pas où reposer la tête, demande l’hospitalité, comme on le voit à Jéricho, où Jésus demande à Zachée de le recevoir chez lui (Lc 19,1-10). Zachée qui l’accueille est de fait accueilli par Jésus, qui le reconnaît comme fils d’Abraham. L’hospitalité est réciproque, c’est ce qui fait sa qualité et sa valeur : elle contribue à un « être ensemble ».

On pourrait croire que l’hospitalité que Jésus suggère aux Douze relève d’une initiative personnelle et d’une attitude individuelle à promouvoir. Mais justement, Jésus transmet sa propre manière de faire à ses disciples, pour que celle-ci se diffuse, s’élargisse à bien d’autres. C’est peut-être ce dont nous avons besoin aujourd’hui avec les exilés, une hospitalité qui n’est pas seulement une vertu personnelle, mais qui soit aussi une attitude partagée, socialement, politiquement.

Père Jean-Marie Carrière, sj

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