Avec Jésus, une mission en mouvement

croix_mainsAu début de l’évangile de Marc, quand Jésus vient se faire baptiser par Jean dans le Jourdain, le ciel s’ouvre et Dieu le révèle comme son Fils bien-aimé. Aussitôt, Jésus affronte Satan au désert, puis il se met en marche à travers la Galilée pour annoncer la Bonne Nouvelle du Royaume de Dieu qui vient : « Le moment est arrivé ! » Or, la suite des événements et des rencontres est si dense dans cette première journée à Capharnaüm que le lecteur ressent presque physiquement l’urgence. Il est essoufflé par les déplacements incessants : Jésus passe au bord du lac et appelle Simon et André à le suivre ; un peu plus loin, il appelle Jacques et Jean, les fils de Zébédée ; entré dans la synagogue de Capharnaüm, il enseigne avec autorité et délivre un homme possédé par un démon ; à la maison, il relève la belle-mère de Simon écrasée par la fièvre ; le soir venu, à la porte de la ville, il guérit de nombreux malades et possédés. Puis, au petit matin, alors qu’il fait encore sombre, il s’en va prier…

Ce que suggère ce mouvement constant, c’est que Jésus ne s’attache pas à un endroit déterminé et ne laisse pas une relation l’enfermer dans un cadre clos, fût-il chaleureux et amical. Sans arrêt, il sort. Le verbe revient à plusieurs reprises. C’est d’abord sa renommée qui « sort » de la synagogue pour se répandre dans toute la Galilée. Lui-même, alors, sort de la synagogue pour aller chez Simon et André. C’est à la porte de la ville qu’il se rend le soir venu. Mais avant l’aube, il sort pour aller prier dans un lieu désert ; et, lorsque Simon et ses amis qui l’ont cherché en vain le retrouvent, il leur déclare : « Allons ailleurs, afin que là aussi j’annonce la Bonne Nouvelle, car c’est pour cela que je suis sorti » (Mc 1,38).
Ainsi Jésus donne-t-il forme à sa mission comme une sortie perpétuelle vers ceux qui sont en difficulté ou en manque d’espérance, vers ceux aussi qui ne l’attendaient pas. Peut-être les quatre disciples rêvaient-ils d’autre chose, ils sont comme aimantés par la présence de celui qui passe en les appelant ; une présence qui délivre le possédé, relève la femme terrassée, attire le petit peuple souffrant de Galilée qu’il vient retrouver. Une mission en mouvement, en sortie constante vers ceux qui, consciemment ou non, ont besoin d’être délivrés, secourus, relevés. L’annonce en acte d’une bonne nouvelle, d’un salut possible. Lorsque Jésus s’explique de façon laconique : « C’est pour cela que je suis sorti », il ne justifie pas seulement une fugue matinale, il ne qualifie pas seulement sa mission, il dit ce qu’il est lui-même. Alors même qu’il a arrêté un instant sa marche pour rejoindre le Père dans la prière, il s’affirme comme celui qui « est sorti » de cette intimité avec le Père, celui qui vient de Dieu pour rejoindre chacun : « Allons ailleurs » !

Les disciples et Simon n’y ont peut-être pas compris grand-chose, et nous sommes souvent interrogatifs devant l’attitude de Jésus. Mais puisqu’ils ont accepté de le suivre, ils sont pris désormais dans ce mouvement de sortie vers les autres. Et nous pouvons nous laisser prendre aussi par cette force qui nous appelle hors de nous-mêmes, pour aller vers ceux qui ont besoin d’un accueil, d’un soin, d’un repas, d’un toit ou d’un geste de fraternité… Pour être, selon l’invitation du pape François, « une Eglise en sortie » !

Roselyne Dupont-Roc, bibliste

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