Vers un homme nouveau dans le Christ (Ephésiens 2, 11-18)

15 février 2017 : Mosaïque de l'Humanité, oeuvre de l'artiste Roberto JOPPOLO, présentée lors de l'audience hebdomadaire, dans la salle Paul VI au Vatican. February 15, 2017: Weekly general audience in the Paul VI hall. Cross, Mosaic of humanity by Roberto JOPPOLO at the Vatican.

15 février 2017 : Mosaïque de l’Humanité, oeuvre de l’artiste Roberto JOPPOLO, présentée lors de l’audience hebdomadaire, dans la salle Paul VI au Vatican.

Dans une vision grandiose, l’auteur de la Lettre aux Ephésiens déploie le dessein de Dieu pour l’humanité. Depuis la fondation du monde, il veut rassembler, réconcilier tous les êtres humains et les conduire à entrer dans sa vie, « dans l’amour ». Au cœur de l’histoire humaine, il a envoyé son Fils ; en mourant sur la croix, Jésus accomplit une réconciliation décisive, source et moteur de toute réconciliation : il réunit en lui-même les deux parties opposées et hostiles de l’humanité telle qu’un Juif pouvait la concevoir : les circoncis et les incirconcis, autrement dit, les Juifs et les païens.

Le texte nous fait assister à cette incroyable réunion : la situation passée des païens est décrite de façon entièrement négative par ce dont ils étaient privés : « sans Messie, exclus de la citoyenneté d’Israël, étrangers aux alliances de la promesse, n’ayant pas d’espérance et sans dieu dans le monde » (v.12). Mais maintenant tout a changé: « en Christ Jésus, vous qui jadis étiez loin, vous êtes devenus proches par le sang du Christ ». Le jeu d’opposition « loin/proche » va servir de trame à l’ensemble du passage.

La transformation annoncée est opérée par le Christ. Il est « notre paix ». Le « notre » reflète les deux groupes, les lointains et les proches, ceux qui viennent du paganisme et ceux qui viennent du judaïsme, désormais réunis dans la paix : « il a fait des deux une seule chose, et il a détruit le mur de séparation, la haine dans sa chair. Le « mur », peut-être celui du Temple interdit aux païens, en tout cas, la matérialisation concrète de la séparation, de l’exclusion, nées de la haine ! Le voilà aboli en Celui qui a pardonné à tous les hommes et les accueille tous.

La suite ouvre une perspective stupéfiante : « afin qu’il crée les deux en lui en vue d’un seul homme nouveau en faisant la paix et qu’il réconcilie les deux avec Dieu en un seul corps, par la croix ». En réconciliant les hommes entre eux et avec Dieu, le Christ inaugure la création nouvelle, en ouvrant la voie à « l’homme nouveau » : les ennemis d’autrefois sont désormais un seul corps.

Des lointains devenus proches 

Le don du Christ continue à abolir l’opposition « lointains/proches ». Car il y a sans cesse des « lointains » qui sont devenus des « proches » par opposition à de nouveaux « lointains » qui un jour doivent devenir proches ! Et la réconciliation ne vaut pas seulement pour les Juifs et les païens mais pour tous ceux du dehors, tous ceux qui sont encore exclus, étrangers, sans alliance et sans espérance dans ce monde. En créant en lui-même l’homme nouveau, le Christ a ré-ouvert pour nous la voie que l’ignorance et la haine avaient fermée : l’accès à Dieu « dans un seul Esprit » (v.18).

L’auteur de la Lettre aux Ephésiens reprend l’enseignement de Paul, « En Christ, il n’y a plus ni juif ni grec, ni esclave ni homme libre…vous êtes un » (Ga 3,28). Il forge l’expression extraordinaire : « l’homme nouveau » (v.15). La réalité baptismale que Paul évoquait revêt une dimension nouvelle, elle s’inscrit dans le dessein de Dieu de toujours à toujours ; l’Eglise est déjà signe de l’humanité nouvelle que Dieu a prévue depuis la fondation du monde, afin de « récapituler toutes choses dans le Christ ».

Aujourd’hui, comme hier, il n’y a réalisation de cet homme nouveau dans le Christ que dans l’arrivée toujours renouvelée des « lointains », de ceux qui viennent de loin vers nous qui nous croyons proches. Mais nous ne serons vraiment proches du Christ qu’en refusant le mur de la haine et en vivant l’accueil et la paix avec ceux qui viennent à nous, pour former avec eux « un seul homme nouveau ».

Roselyne Dupont-Roc, bibliste

Sur le même thème