Comment accompagner l’éventuelle désillusion de l’arrivée en France ?

30 octobre 2015 : La "nouvelle jungle", le camp de réfugiés à Calais.

30 octobre 2015 : La « nouvelle jungle », le camp de réfugiés à Calais.

Dans leur pays d’origine, certains étaient au chômage, manquaient d’argent, se trouvaient dans des situations de travail rendant nulle toute ambition. Le cas échéant, ils ont pu se laisser aveugler par les discours de leurs compatriotes de passage leur faisant miroiter l’aisance de la vie quotidienne et professionnelle, vantant le gain d’un argent vite amassé dans le pays d’accueil. D’autres fuyaient la guerre, la persécution, la terreur et s’attendaient à trouver en France la sécurité et un Etat de droit.

Or, au bout de quelque temps, la France peut facilement perdre son attrait, surtout en période de crise économique et de méfiance face aux étrangers. De « Terre promise », elle devient territoire hostile, où il devient nécessaire de faire face à des difficultés insoupçonnées.

Lorsque les migrants sont confrontés à la désillusion

  • Un nombre croissant de migrants sont marqués par les traumatismes et la violence du parcours migratoire. Ils arrivent fragilisés, souvent sans énergie et sans ressources psychologiques pour construire un nouveau projet en France.
  • Fraîchement débarqué, l’isolement et la souffrance constituent les premiers obstacles contre lesquels bute le migrant. Sans famille, sans relations, ni amis, il fait l’expérience de la solitude. La langue qu’il ne maîtrise pas ou peu rend laborieuse toute rencontre. A la moindre démarche, il lui faut décliner son identité, avec très souvent un nom qui  pourrait dérouter une oreille française, et un accent qui le trahit.
  • Parfois, le migrant est confronté à l’épreuve du regard qui dévisage, qui interroge, qui juge. Sans comprendre nécessairement pourquoi, il constate avec douleur dans le regard de l’autre une hostilité à son égard. Certaines nationalités, certaines origines sont plus touchées que d’autres. Parfois, c’est la religion qui suscite une méfiance plus grande. Cette différenciation constitue en elle-même une souffrance, se relevant facteur de marginalisation et d’exclusion.
  • A cette désillusion d’ordre social peut s’ajouter la désillusion professionnelle. Confronté à l’interdiction légale de travailler, au chômage ou exploité dans un travail clandestin, le migrant peut ainsi réaliser que l’argent ne se gagne pas aussi rapidement que prévu. Lorsque le travail est au rendez-vous, souvent avec un métier qui ne tient pas compte de ses études ou de ses compétences, c’est parfois dans des conditions difficiles, avec de longs déplacements qui occasionnent de la fatigue, etc.
  • La déception ne manifeste qu’un demi mal quand elle se limite à un rythme de vie difficile. Le désenchantement devient intolérable lorsqu’il se traduit dans des conditions de vie presque aussi pénibles et misérables que celles endurées au pays.

Comment aider à traverser cette période de désillusion ?

  • Dans cette période, l’aide apportée aura nécessairement une forte dimension matérielle. Pour être efficace, il importe de travailler en réseau et de savoir faire appel aux acteurs les plus compétents sur la question soulevée.
  • Au-delà de l’aide matérielle, il importe de faire vivre une véritable hospitalité. Cette hospitalité doit permettre au migrant d’être accueilli, non pas seulement comme un bénéficiaire, mais comme un ami, un frère ou une sœur, qui n’est pas seulement dans la demande mais peut donner.
  • L’accompagnement concret dans cette période difficile permet de découvrir et de se familiariser avec le nouvel entourage : aide pour des traductions, soutien dans les méandres de l’administration française, sorties culturelles, rencontres conviviales avec des migrants d’autres nationalités ou des personnes du pays d’accueil, etc.
  • La rencontre avec des compatriotes via des associations émanant de leur pays d’origine peut s’avérer bénéfique pour aider à exister et se sentir valorisé au milieu de cette société, sans renier ni ses racines ni ses attaches.

Ils ont dû dormir dans le métro ou dans des centres pour clochards, partager à plusieurs une chambre d’hôtel meublée ou une mansarde. Ne maîtrisant pas du tout le français, les Tamouls, même après avoir fait de hautes études, sont contraints à trouver un travail manuel – ménage, plonge ou distribution de prospectus – et sont corvéables à merci.

Un Tamoul Sri Lankais sur l’expérience de ses compatriotes

J’imaginais la France comme un pays où tout semblait facile. C’est peut-être à cause des migrants portugais qui, pendant les vacances au Portugal, ne disaient pas la vérité et nous trompaient.

Un travailleur portugais

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