« Par l’autre voie » de Joanne Yang
Texte de Joanne Yang (Aumônerie Hmong) offert lors de leur baptême en 2021 à deux jeunes africains qui avaient fui par bateau et étaient arrivés à Orléans.
Il est temps de prendre le large, d’embarquer sur ce navire de fortune
Pendant que le calme faisait danser de petites vagues sur la mer.
Remonter l’ancre dont les racines prenaient vie dans les entrailles
Et prendre enfin le cap de l’inconnu, la route menant au Salut.
Armés de détermination et la volonté au cœur, la peur nouant
Le ventre qui finit par taire la faim défaillant le corps et l’esprit.
Le navire roule et chavire sous le poids de la tempête hantant
La tête de chaque âme aux yeux hagards laissant sortir le cri de vie.
Tous pensaient, croyant atteindre les Cieux par la mer se faisant juge
En délivrant des profondeurs de ses entrailles les pires tentations.
La mer montrant son visage déchaîné pour prendre à son aise
Les plus faibles des faibles tombés du navire cahotant sans cesse.
Les esprits malins sont à l’œuvre sur la mer pour assouvir leur faim
Alors tremblants, les choristes d’une seule voix unissant leur prière,
Les yeux tournés vers le ciel brumeux pour y voir le signe de Dieu.
Enfin souffle l’Esprit divin chassant sirènes, pieuvres et vents, guidant
Le navire apeuré sur le bon cap installant déjà la sérénité bienvenue.
A l’horizon pointe le nouveau jour, promettant la paix tant recherchée
Dans les cœurs effondrés et les esprits embrouillés de pleurs cachés.
Les corps retrouvant la souplesse de leurs mouvements accueillent
Pour un court instant le repos délivrant et apaisant du soleil pointant.
Le navire arrivant à bon port, allégé de sa cargaison vivante d’où
Fusent et se mêlent les cris de victoire, de joie et de détresse folle.
Tous se souvenant que la mort les avait happés de ses tentacules
Et n’oublieront jamais les visages et les cris des âmes noyées, perdues.
Pour elles, ils continueront d’avancer plus fort, délaissant les futilités
Pour ne s’armer que de la Sainte Ecriture comme itinéraire de vie.