Quelle politique migratoire en Europe ?

La Commission européenne a présenté, mercredi 13 mai 2015, sa stratégie pour l’asile et l’immigration, avec des mesures immédiates permettant de prévenir les tragédies humaines et de renforcer les mécanismes de réponse aux situations d’urgence :

  • renforcer la présence en mer pour sauver des vies
  • s’attaquer aux réseaux criminels de passeurs
  • faire face aux arrivées en nombre au sein de l’Union à l’aide d’un mécanisme de répartition des demandeurs d’asile (relocalisation)
  • faire venir dans l’Union, dans des conditions sûres et légales, un nombre accru de réfugiés originaires de pays tiers (réinstallation)
  • utiliser les instruments opérationnels et financiers de l’Union pour aider les États membres situés en première ligne.

Parmi les mesures proposées par la Commission: un mécanisme de relocalisation temporaire des demandeurs d’asile nécessitant de manière évidente une protection internationale, en vue d’une répartition à la fois plus équitable et plus équilibrée entre les États membres ; ce mécanisme sera basé sur une clé de répartition (« quota ») qui prendra en compte des critères tels que le PIB, la taille de la population, le taux de chômage, le nombre de demandeurs d’asile déjà acceptés et celui des réfugiés déjà réinstallés dans chaque pays.
La Commission propose également une nouvelle approche stratégique afin de mieux gérer les migrations à moyen et à long termes. Celle-ci s’appuiera sur les quatre piliers suivants:

  1. réduire les incitations à la migration irrégulière;
  2. sauver des vies et assurer la sécurité des frontières extérieures;
  3. une politique commune solide en matière d’asile;
  4. une nouvelle politique de migration régulière.

Source: Fiche d’information de la Commission Européenne du 13 mai 2015.

En réaction à ces propositions de la Commission Européenne, plusieurs pays, dont la France, ont exprimé sans tarder leur rejet des quotas de répartition entre Etats membres.

Le père Patrick Daly, secrétaire général de la Commission des épiscopats de la Communauté européenne (COMECE), a réagi positivement à cet Agenda européen sur la migration. « La COMECE, qui compte les politiques européennes de migration et d’asile parmi ses préoccupations centrales, se félicite des propositions concrètes émises aujourd’hui par la Commission européenne, a-t-il déclaré. Elles représentent une avancée significative dans la lutte contre les tragédies répétées en Méditerranée. Les propositions formulées par la Commission européenne, si elles étaient adoptées par les États membres, traduiraient dans les faits l’engagement à la solidarité entre États membres et soulageraient l’inacceptable souffrance humaine subie par les hommes et les femmes en quête d’asile sur notre continent. »
Il a rappelé l’importance des politiques de co-développement pour résoudre les problèmes: « La Commission européenne et les États membres devraient élaborer un lien plus systématique et clair entre politiques de migration et de développement, en dialogue avec les pays tiers. »

Source : Site Internet de Radio Vatican

Lundi 18 mai 2015, les ministres des Affaires étrangères et de la Défense de l’Union européenne se sont réunis à Bruxelles. Ils ont décidé de mettre en place l’opération EU Navfor Med (force navale européenne en Méditerranée) pour lutter contre les passeurs de migrants en Méditerranée.Plusieurs étapes sont prévues pour le déploiement de cette mission afin de garantir que les opérations militaires respectent bien le droit international. Le ministre belge de la Défense, Steven Vandeput, a évoqué « trois phases » : l’identification des réseaux responsables du trafic des êtres humains ; des interceptions et des abordages d’embarcations dans les eaux internationales, puis la « neutralisation » de navires dans des eaux territoriales ce qui nécessitera une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU. (Communiqué du 18 mai 2015, en anglais)
La mission militaire est unanimement dénoncée par nombreuses ONG car elle augmentera les risques pour les migrants et va seulement déplacer les routes migratoires.

Le projet de détruire les bateaux des passeurs avait déjà été évoqué lors du sommet extraordinaire des dirigeants de l’UE fin avril. Le Cardinal  Vegliò, président du Conseil pontifical pour la Pastorale des Migrants, l’avait rejeté immédiatement. « Voici une idée très étrange! Qu’est-ce qu’ils vont bombarder? Il y a le droit international! Bombarder dans un pays est un acte de guerre », avait fustigé le cardinal italien Antonio Maria  Vegliò à l’agence de l’épiscopat italien SIR. « Qu’est-ce qu’ils vont viser? Seulement les petits bateaux des migrants? Qui garantit que cette arme ne tuera pas aussi les personnes à proximité, en plus de détruire les bateaux », a ajouté le cardinal, en remarquant: « Tant qu’il y aura les guerres, les dictatures, le terrorisme et la misère, il y a aura des réfugiés qui iront là où ils pourront aller ».

Après le sommet européen fin avril, nombreuses associations et acteurs de la société civile se sont réunis pour lancer un appel commun au Président de la République et à tous les élus nationaux et internationaux : « Contre les naufrages en Méditerranée : des ponts, pas des murs ! » Ils revendiquent de:

  • mettre en œuvre sans délai une véritable opération de sauvetage en mer, dotée de moyens à la hauteur des besoins et portée par l’ensemble des États membres, à même de prévenir les naufrages et de secourir efficacement toute personne en détresse.
  • mettre en place un mécanisme d’accueil des personnes migrantes et réfugiées sur la base de la solidarité entre États membres, en activant en particulier le dispositif prévu par la directive européenne du 20 juillet 2001 relative à la protection temporaire en cas d’afflux de personnes déplacées.
  • ouvrir des voies d’accès au territoire européen pour les personnes migrantes et réfugiées, dans le respect du droit international et européen.
  • bannir en matière de migrations toute coopération avec des États tiers, d’origine et de transit, qui ne respectent pas les libertés et droits fondamentaux.

Dans le cadre de cet appel à la mobilisation, différentes initiatives sont prévues entre le 20 et le 30 mai en France, puis en juin au niveau européen pour mobiliser la société civile.

Télécharger l’appel « Contre les naufrages en Méditerranée : des ponts, pas des murs ! »

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