70 maires européens reçus au Vatican

Lampedusa, Lesbos, deux îles symbole en Méditerranée… Mais aussi Paris, Madrid, Copenhague, Tripoli, Bruxelles, Manchester… Plus de 70 maires, en majorité européens, se sont retrouvés pendant deux jours, les 9 et 10 décembre, au Vatican à l’appel du Saint-Père pour discuter d’une question cruciale et actuelle : l’accueil des réfugiés. Par Romilda Ferrauto

Le sommet s’est déroulé sous les auspices de l’Académie pontificale des Sciences qui fait office, depuis le début de ce pontificat, de laboratoire d’idées en vue d’un monde plus juste. « Europe : les réfugiés sont nos frères et sœurs » , le thème choisi annonçait la couleur, dès le départ, et les intervenants sont tous allés dans le même sens, plaidant pour une Union européenne plus solidaire, appelant à construire des ponts plutôt que des murs.

Ils ont, l’un après l’autre, insisté sur le devoir moral et civil d’accueillir ceux qui fuient la faim, la violence, les catastrophes naturelles, les guerres ; des fléaux auxquels s’ajoutent la traite des êtres humains et toutes les nouvelles formes d’esclavage. Les participants ont dit non à une Europe qui refuse de regarder en face le phénomène migratoire et qui préfère s’en tenir à des interventions d’urgence. Ils ont fustigé les tentatives de récupération politique de ce drame de notre temps. Beaucoup se sont dit préoccupés par le manque de coordination en matière de répartition entre les pays européens. Pour la maire de Barcelone, avant d’affronter la crise des réfugiés, il faudrait affronter celle que connait le projet européen. Selon elle, ce sont les partis d’extrême-droite qui vont faire exploser l’UE et non pas les flux de migrants.

L’intégration requiert des moyens
Mais les participants n’ont pas manqué d’aborder avec lucidité l’impact des flux migratoires sur les communautés locales. Dans les banlieues dégradées des grandes villes, a ainsi prévenu la maire de Rome, on risque d’assister à une guerre des pauvres, des laissés-pour-compte. Des édiles ont insisté sur la nécessité de garantir la sécurité, le respect des règles et la réciprocité pour rassurer les citoyens. Cela pourrait passer par la création d’un réseau des municipalités urbaines, qui sont les principales concernées. La maire de Madrid, en particulier, a estimé qu’il fallait renforcer le pouvoir des autorités locales pour qu’elles puissent offrir des services sociaux et des emplois aux réfugiés afin de leur assurer une vie digne.
Beaucoup de maires des grandes villes allemandes étaient présents à ce rendez-vous. La France était essentiellement représentée par la maire de Paris qui a pris une part active à l’organisation du congrès. Dans son intervention, Anne Hidalgo a notamment rappelé l’ouverture du centre humanitaire de la Chapelle, dans le XVIII° arrondissement, destiné à accueillir les migrants. Une attention particulière a été recommandée à l’égard des mineurs non accompagnés qui sont arrivés par milliers cette année en Europe. Tous les enfants doivent avoir accès aux écoles si on veut favoriser le vivre ensemble et la cohésion.

Si l’Europe avait davantage confiance dans son identité et sa culture, elle ne se sentirait pas menacée
Très remarqués, les maires de la péninsule italienne, en première ligne sur le front migratoire, ont rappelé dans une déclaration commune les 24 millions d’italiens qui ont émigré à l’étranger entre la fin du 19° et le début du 20° siècle. « L’Italie sait ce que veut dire devoir quitter sa propre terre pour un avenir incertain…Mais l’Italie ne peut pas être abandonnée à elle-même », ont-ils martelé. Le maire de Catane, en Sicile, s’en est pris en particulier à ceux qui propagent la peur de l’étranger pour trouver des boucs émissaires.
Seule ombre au tableau, le Pape François, très engagé sur cette question, s’est décommandé au dernier moment, sans explication, « mais il est avec nous », a assuré le Chancelier de l’Académie, Mgr Marcelo Sanchez Sorondo ; une déception pour les participants qui attendaient impatiemment d’entendre sa parole. En juillet 2015, le Vatican avait déjà accueilli un sommet des maires du monde entier consacré au thème du développement durable.