Paroles d’aumôneries sur la transmission dans le contexte de la migration
Au Conseil national des aumôneries 2022, les aumôneries ont pu échanger avec Ferdinand Ezémbé, docteur en psychologie et directeur d’Axes Pluriels, suite à son intervention sur « La transmission en contexte migratoire ».
Aumônerie nationale des Africains :
Les jeunes sont habités par des cultures qu’ils connaissent mal. Tout ce qu’ils ont reçu est en germe et finit par porter ses fruits. Africatho est né de la demande faite, par les jeunes à leurs aînés, de les accompagner, mais d’arrêter de leur dire ce qu’ils doivent faire: ils veulent vivre leur foi à leur façon.
Ferdinand Ezémbé : Il faut preuve d’inventivité, se poser la question de ce à quoi nous sommes prêts à renoncer pour accueillir, écouter les demandes qui nous sont faites.
Aumônerie nationale des Polonais :
Problème de transmission de la foi dans une société touchée par l’apathéisme (indifférence religieuse, attitude de neutralité vis-à-vis des religions et des spiritualités). Comment transmettre la foi dans une société qui glorifie la réussite sociale, la religion étant parfois vue comme un frein ? Il faut conjuguer les valeurs que nous portons et celles qui nous sont transmises.
Aumônerie nationale des Hongrois :
Un évêque hongrois a demandé à la responsable de la communauté : « Pourquoi est-ce que la communauté demande un prêtre, puisque la France est un pays laïc ? » Souvent laïcité et athéisme sont confondus, alors que les paroisses françaises connaissent aussi une vie formidable.
Aumônerie nationale des Sri Lankais :
Comment transmettre les valeurs culturelles à la seconde génération? C’est très difficile quand le mode de vie du pays d’origine des parents et celui du pays dans lequel sont nés/ont grandi les enfants sont très différents. La situation peut devenir douloureuse pour les enfants et les parents.
F.E. : Au Canada, est né la notion d’« accommodement raisonnable » : que peut-on aménager comme compromis pour que les valeurs, les exigences de chacun cohabitent sans heurts ? Attention aux contradictions entre la posture et les dires.
Aumônerie nationale des Vietnamiens :
Les problèmes de transmission ne sont-ils pas aussi liés à l’âge ? Parfois le rejet découle de la volonté des jeunes de s’affirmer par rapport aux parents. Comment aider les parents à ne pas se décourager, à continuer de communiquer avec leurs enfants ?
F.E. : Il faut que les parents acceptent d’être mis en contradiction. Il y a trois lieux où les enfants sont influencés : la famille, l’école et les médias/réseaux sociaux ; l’enfant est soumis à des informations contradictoires. Il faut discuter ! À cela s’ajoutent parfois des différences de valeurs (exemple des mariages forcés). Comment résoudre ces contradictions ?
Aumônerie nationale des Bangladeshis :
Ne faudrait-il pas dépasser l’histoire du colonialisme ? Si les peuples des anciens pays colonisés s’approprient leur histoire dans son entièreté, peut-être arriverons-nous à avancer plus facilement. Le passé ne peut être gommé.
F.E. : Cette question a été relancée par les jeunes qui reprochent à leurs parents de ne pas leur avoir parlé de cette histoire. Les parents voulaient l’oublier et ne pas la leur transmettre. Cette non-transmission a créé un mal-être psychologique chez leurs enfants. Peut-on tout transmettre ? Ne peut-on autoriser les enfants à dire ce qu’ils veulent et ce qu’ils ne veulent pas ?
Aumônerie nationale des Antillais-Guyanais :
Nous avons tous un effort à faire pour connaître nos racines, les comprendre et les valoriser. Il faut que nos cultures s’enrichissent les unes les autres.
Aumônerie nationale des Italiens :
La transmission est un thème très complexe qui peut être abordé sous différents angles : la culture, la foi… C’est un chantier ouvert, comme celui de la migration. La foi peut être transmise sous une forme traditionaliste, un peu rigide, ou de religion à la carte, où je choisis les valeurs qui ne me gênent pas.
F.E. : Nous travaillons toujours entre le général et le particulier.
Transcription par Maria Mesquita Castro (SNMM)