Moïse, la migration vers la libération de l’esclavage
L’Exode est le départ des Hébreux de l’Egypte et c’est l’évènement fondateur de l’histoire du peuple d’Israël, qui, par cet événement, devient une nation. Ce voyage-migration constitue la période des fiançailles d’Israël avec Yahwé, un Dieu itinérant, qui plante sa tente dans le campement du peuple en marche. Ce même Yahwé qui le rappelle au roi David, lorsque celui-ci veut lui construire une maison définitive, en cèdre (2 Sam 7ss)
Les récits de l’Exode transmettent ainsi des éléments par rapport à la considération de l’étranger : dans une terre fertile comme l’Egypte, des groupes d’étrangers venus en migrants se trouvent désormais en situation d’esclavage et ils se reconnaissent liés entre eux par une ancienne promesse et un destin commun. Le nouveau pharaon incarne le changement de perceptions de ces étrangers (Ex 1,8-22) : les anciens migrants, qui avec Joseph avaient été une opportunité pour l’Egypte, sont maintenant devenus et perçus comme “nombreux” et “dangereux” pour la cohabitation.
C’est dans ce contexte que Moïse devient emblématique. Moïse était un Hébreu, naturalisé égyptien, et donc dans une situation d’extranéité et par rapport aux Egyptiens et par rapport à son peuple. Mais Moïse sort de sa situation d’étrangeté pour aller à la rencontre de ses “frères” : c’est la première fois que, dans l’Exode, l’on parle des fils d’Israël comme des frères. Moïse va vers eux, il dépasse la séparation qui naît de la diversité de condition sociale. Cela lui permet de se rendre compte de leur situation et il se laisse toucher par leur situation de détresse. Il reconnaît l’oppression vécue par ses frères, il se positionne à leurs côtés en défense de la justice, il assume leur destin comme son propre avenir. Il devient ainsi étranger parmi des étrangers pour les conduire vers la libération.
Moïse a reçu de Dieu la mission de faire sortir les esclaves hébreux de l’Egypte pour les conduire vers la Terre Promise. Malgré les hostilités et la puissance du pharaon et l’infidélité du même peuple hébreu, Moïse a pu accomplir sa promesse. Toutefois le voyage-migration à travers le désert va au-delà de la dimension historique pour devenir surtout théologique : ce qui est vraiment important est qu’Israël, dans le désert de la vie, a pu faire l’expérience de Dieu, un Dieu imprévisible, présent et actif dans les situations les plus difficiles. L’exode du peuple d’Israël va au-delà d’une simple libération socio-politique : dans le désert, le peuple entreprend une sorte de pèlerinage vers Dieu, le seul qui puisse vraiment libérer (Ex 2,23b-25 ; 3,7-8 ; 20,2), car c’est un Dieu qui a eu pitié de son peuple opprimé, qui a vu ses souffrances et qui est toujours là, marchant avec lui, pour le sauver (Ex 13,17-19 ; 13,21-22 ; 25,10). Pendant le voyage dans le désert, Dieu se manifeste à son peuple, mais en même temps, il établit avec lui des liens de communion et fraternité. Il le fait marcher, le guide parce qu’il est impliqué dans son chemin : Dieu et son peuple parcourent le même chemin.
Cependant, dès qu’il entreprend sa marche dans le désert, le peuple commence à se plaindre, jusqu’à défier son Dieu avec la construction du veau d’or (Ex 32,1-10). Comment interpréter ces évènements ? Dieu a libéré librement et gratuitement son peuple, mais cela n’exonère pas les Israélites de l’exercice de leurs responsabilités. Dieu, par son action libératrice, veut éduquer son peuple pour qu’il sache utiliser sa liberté et pour cette raison, il le fait passer par des épreuves (Ex 15,25 ; 16,4 ; 20,20). La marche dans le désert devient alors une longue période d’apprentissage : Dieu éduque son peuple comme un père son enfant, alternant l’épreuve et la difficulté, avec la tendresse et la compassion.