L’étranger, pauvre et sans défense

© costanzamiriano.comDans les textes de l’Ancien Testament, la catégorie de l’étranger est la base qui mène à la naissance d’un nouveau peuple de frères, qui s’installe dans le pays de Canaan ; le pays que Dieu avait promis aux patriarches.

Dans cette nouvelle société, on assiste aussi à la naissance de nouvelles catégories de pauvres : l’étranger, la veuve et l’orphelin (Ex 22,20-23 ; Dt 10,18 ; 24,17-21 ; 26,12 ; 27,19 ; Jr 7,6 ; 22,3 ; Za 7,10 ; Ps 146,3).

Leur situation fait l’objet de l’attention biblique, non pas tant en raison de leur indigence économique, mais plutôt par leur exposition à l’injustice. Dans cette triade, si l’on souligne que Yahvé fait justice à la veuve et à l’orphelin, l’on distingue l’immigré comme une personne que Dieu aime tout particulièrement (Lv 19,34 et Dt 10,17-18).

« Tu n’exploiteras pas l’immigré, tu ne l’opprimeras pas, car vous étiez vous-mêmes des immigrés au pays d’Égypte » (Ex 22,20) ; «Tu n’opprimeras pas l’immigré : vous savez bien ce qu’est sa vie, car vous avez été, vous aussi, des immigrés au pays d’Égypte » (Ex 23,9) : la lecture de ces impératifs visant la protection des étrangers de l’exploitation ou de l’oppression dont ils pourraient être victimes, montre que la référence à l’Égypte joue un rôle déterminant. En Égypte, les Israélites ont su, en effet, ce qu’est être étranger et opprimé dans un pays qui n’est pas le sien. Mais en Égypte, ils ont également fait l’expérience d’un Dieu libérateur de la misère dans laquelle ils se trouvaient. En liant ces deux souvenirs, la Bible invite les Israélites à ne jamais oublier ce qu’ils ont vécu et à en tirer les conséquences : vous avez été étrangers et vous avez souffert, mais vous avez vu Dieu vous libérer ; sachez donc maintenant être le peuple du Dieu qui prend soin de l’étranger résidant chez lui, et qui le libère de toutes les formes d’exploitation et d’oppression.

En rapprochant ensuite le soin pour l’étranger de celui pour la veuve, l’orphelin et les agriculteurs endettés, l’étranger-résident est mis ainsi sur le même pied que l’Israélite pauvre à propos duquel il est dit qu’on doit lui rendre son manteau pour le coucher du soleil, « car s’il arrivait qu’il crie vers moi, je l’écouterais, car moi je suis compatissant » (Ex 22,21-26). Donc, il n’y a pas de différence, pour Dieu, entre l’étranger-résident et l’Israélite pauvre. Et la Bible n’accepte pas une mentalité qui considère l’étranger à un niveau inférieur et dénonce les attitudes qui l’humilient.

En conséquence, le critère d’une vie communautaire en harmonie avec la volonté de Dieu « qui protège l’étranger. Il soutient la veuve et l’orphelin, il égare les pas du méchant » (Ps 145,9) réside dans la qualité de l’accueil et de la protection des étrangers, en qui l’on apprend à reconnaître des frères aimés de Dieu et que l’on apprend à aimer comme soi-même, en œuvrant pour qu’ils deviennent progressivement des sujets de la loi.

Rien d’étonnant, donc, si des prophètes comme Ezéchiel ou Jérémie rappelleront sans cesse aux rois et au peuple ces exigences radicales par rapport aux étrangers : « Chez toi, on dédaigne père et mère ; au milieu de toi, on fait violence à l’immigré ; chez toi, on exploite l’orphelin et la veuve. […]. Les gens du pays pratiquent la violence et commettent des fraudes, ils exploitent le pauvre et le malheureux, ils font violence à l’immigré, au mépris du droit » (Ez 22,7.29) ; « Si vraiment vous rendez meilleurs vos chemins et vos actes, si vraiment vous maintenez le droit entre un homme et son prochain, si vous n’opprimez pas l’immigré, l’orphelin ou la veuve, si vous ne versez pas, dans ce lieu, le sang de l’innocent, si vous ne suivez pas, pour votre malheur, d’autres dieux, alors, je vous ferai demeurer dans ce lieu, dans le pays que j’ai donné à vos pères, depuis toujours et pour toujours » (Jr 7,5-7) ; « Ainsi parle le Seigneur : pratiquez le droit et la justice, délivrez l’exploité des mains de l’oppresseur, ne maltraitez pas l’immigré, l’orphelin et la veuve, ne leur faites pas violence ; et ne versez pas en ce lieu le sang de l’innocent » (Jr 22,3).

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